Plusieurs se demandent ce qu’on doit surveiller, enregistrer – ou potentiellement obséder – comme métriques à l’entraînement. Par exemple, si j’ai déjà ré-hypothéqué ma maison pour m’équiper d’un capteur de puissance, quel est l’intérêt d’enregistrer aussi mes fréquences cardiaques? Pourquoi avoir les deux données? Sans aucun doute, la combinaison de sa puissance et de ses fréquences cardiaques est ce qu’il y a de mieux, pour vous… et votre coach! 😉

Travail vs Résultat

Comme coach, j’aime bien voir l’évolution de la corrélation entre la fréquence cardiaque (bpm) et la puissance développée (watts) durant une séance de vélo. La puissance reflète le résultat obtenu par un effort alors que la fréquence cardiaque représente le travail nécessaire pour y parvenir.

Une analogie me vient en tête… Imaginez deux étudiants, sans se consulter, produisant le même devoir leur méritant exactement la même note par leur professeur. Le résultat est donc exactement le même pour les deux élèves. Par contre, ce que l’histoire ne dit pas est qu’alors que le premier a mis plusieurs heures de recherche, d’effort et de nuits blanches à peaufiner son papier, le second, plus talentueux n’a passé qu’un après-midi pour produire son chef d’oeuvre. Évidemment, pour les deux étudiants, le travail (input) nécessaire n’a pas du tout été le même pour en arriver au même résultat (output). Le résultat, la note finale, correspond à la puissance, c’est-à-dire le wattage à vélo. Le travail nécessaire, l’effort, correspond à la fréquence cardiaque de l’athlète pour générer cet effort. La comparaison est imparfaite parce que la fréquence cardiaque n’est pas comparable d’un individu à l’autre mais ça reste une façon de vulgariser les deux concepts!

Fréquence cardiaque = Effort = Input.
Puissance = Résultat = Output.

La combinaison des deux mesures de travail et de résultat permet de repérer plus facilement les anomalies. Pendant l’analyse, gardons en tête que la puissance est une mesure instantanée alors que les pulsations prennent un certain temps à se stabiliser lors d’un effort. Il ne faut pas non plus obséder à analyser une seule séance; les fréquences cardiaques sont aussi affectées par plusieurs facteurs externes: caféine, stress, fatigue, etc. Si on veut être sérieux, il faut prendre un groupe de séances similaires exécutés dans des conditions similaires: nutrition, niveau de fraîcheur, heure du jour, etc.

Quand utiliser les fréquences cardiaques en entraînement?

Zones d’intensité des fréquences cardiaques

Avant la démocratisation du capteur de puissance, les plans d’entraînement étaient basés sur nos zones de fréquences cardiaques. Maintenant, la puissance étant la métrique ultime, les fréquences cardiaques en relation avec cette puissance sont utiles pour raconter une histoire et peuvent même être la référence lors de certaines séances, en période d’adaptation, par exemple en camp d’entraînement en altitude comme l’explique un coach de Lotto-Dstny, équipe cycliste professionnelle:

For training, heart rate is not the first thing we look at. Power output is the primary number that riders follow, but we still look at heart rate in relation to power and it is still monitored like we used to do. 

When a rider goes on an altitude camp, endurance training can be set by using a heart rate zone instead of a power zone, especially during the adaptation period. Heart rate will then help to set the right intensity on long easy rides.

Lotto-Dstny
Zones d’intensité de puissance

Fatigue

Une première raison de surveiller ses fréquences cardiaques à l’entraînement est d’évaluer son niveau de fatigue. Si on n’arrive pas à faire monter ses pulsations quand on force fort, ça peut être un signe qu’on n’a pas bien récupéré des séances précédentes et qu’il vaudrait mieux se reposer en transformant l’objectif de sa séance en récupération active ou s’arrêter tout simplement. L’expérience vous aidera à prendre la décision.

Dérive (ou découplage) cardiaque

Dans certaines séances de vélo, la fréquence cardiaque couplée à la puissance servent à mesurer le phénomène de dérive cardiaque (aerobic decoupling ou cardiac drift). Il est souvent identifié par cette notation: Pw:HR (puissance) et Pa:HR (allure).

En termes simples, la dérive ou découplage cardiaque se produit lorsque la relation entre la fréquence cardiaque (FC) et la puissance (ou la vitesse) n’est plus constante pendant un intervalle d’entraînement aérobie prolongé. Normalement, lorsqu’une personne s’engage dans une activité aérobie, la fréquence cardiaque augmente proportionnellement à l’intensité de l’effort. Cependant, dans le cas de la dérive cardiaque, on observe un écart ou un découplage entre la fréquence cardiaque et la puissance, ce qui signifie que la fréquence cardiaque peut augmenter ou diminuer même lorsque la puissance (ou la vitesse) reste constante.

On observe bien malgré la puissance qui diminue, les fréquences cardiaques augmentent. Il y a dérive cardiaque.

Ce phénomène peut être interprété de différentes manières en fonction des objectifs d’entraînement. Par exemple, si la fréquence cardiaque augmente plus rapidement que prévu pour un niveau d’effort constant, cela pourrait indiquer une fatigue ou une dégradation de la performance aérobie. À l’inverse, si la fréquence cardiaque diminue tout en maintenant la même puissance, cela pourrait suggérer une amélioration de l’efficacité aérobie.

L’utilisation du découplage cardiaque permet aux athlètes et aux entraîneurs de surveiller la qualité de l’effort aérobie, d’ajuster les plans d’entraînement en conséquence et de détecter des signes potentiels de surmenage ou de fatigue. C’est un outil pouvant contribuer à optimiser la planification de l’entraînement et à améliorer les performances. Il est généralement accepté qu’un découplage de moins de 5% est un signe de fitness.

Ceinture vs capteur optique

Les coureurs et cyclistes sérieux portent la ceinture cardiaque et ça s’explique. Bien que les capteurs optiques présents sous les boîtiers de montre intelligentes paraissent pratique en théorie car non invasifs, ils ne sont vraiment pas précis comparés aux ceintures portées sous le buste. La proximité de la peau, la sueur, la température peuvent faire varier énormément la mesure des capteurs optiques.

Optez pour un modèle de ceinture compatible autant Bluetooth que Ant+. Certains modèles, plus dispendieux ont aussi des accéléromètres intégrés vous enregistrant une multitude de données supplémentaires telles que:

  • Oscillation verticale
  • Longueur de votre foulée
  • Nombre de pas à la minute
  • Temps de contact au sol

Mesure de la fréquence cardiaque hors entraînement

À l’extérieur de l’entraînement, grâce aux capteurs optiques sous nos montres intelligentes, on peut enregistrer et surveiller notre variabilité cardiaque.

La Variabilité de la Fréquence cardiaque (VFC) est une mesure pratique, non-invasive et reproductible de la fonction du système nerveux autonome. Bien que le cœur soit relativement stable, les temps entre deux battements cardiaques (R-R) peuvent être très différents. La VFC est la variation dans le temps de ces battements cardiaques consécutifs. La VFC est censée correspondre à l’équilibre entre les influences sympathiques et parasympathiques sur le rythme intrinsèque du nœud sino-auriculaire.

La VFC est liée au mode de vie, à l’activité physique, aux habitudes alimentaires, au rythme du sommeil et au tabagisme. La diminution de la VFC est associée aux risques d’événements cardiaques chez les adultes; elle est un facteur prédictif de l’hypertension artérielle. Une VFC diminuée est liée à un risque accru de décès et elle pourrait avoir une valeur prédictive pour l’espérance de vie et la santé. Les changements de la VFC dus à des facteurs de style de vie précèdent le développement de troubles cardiovasculaires. La mesure des composants de la VFC est d’un grand intérêt dans la pratique médicale et pour les experts en santé publique, pour prédire et évaluer les risques d’événements cardiométaboliques liés à un mode de vie souvent inadéquat.

J’ai écrit un billet décrivant un peu cette variabilité de la fréquence cardiaque ou heart rate variability (HRV).

Enregistrer votre fréquence cardiaque dans vos entraînements de triathlon est une stratégie intelligente pour maximiser vos performances. Cela fournit des données objectives pour ajuster l’intensité de l’entraînement, prévenir le surentraînement, optimiser la récupération et personnaliser votre programme d’entraînement. En intégrant la surveillance de la fréquence cardiaque dans votre routine d’entraînement, vous aurez un avantage significatif pour atteindre vos objectifs en triathlon. Alors, équipez-vous d’un bon moniteur de fréquence cardiaque, suivez vos chiffres et préparez-vous à atteindre de nouveaux sommets dans votre parcours de triathlète!

À retenir!

  1. Une faible dérive cardiaque (< 5%) durant de longs intervalles à une intensité constante signifie un haut niveau de fitness. Alors, espérons que vous avez un événement bientôt!
  2. Une haute variabilité cardiaque (HRV) par rapport à votre standard est généralement signe de bonne santé.
  3. Pour une lecture précise de votre fréquence cardiaque, préférerez une ceinture à un lecteur optique.