Tu as peut-être entendu des athlètes parler de « bicarbonate » comme d’un petit boost magique. En réalité, ce n’est pas magique. C’est une stratégie physiologique basée sur un principe simple : tamponner l’acidité produite par les muscles quand tu pousses fort. Mais comme souvent, le diable est dans les détails : dose, timing, tolérance gastro-intestinale, type d’effort et profil de l’athlète vont tout changer.
Qu’en dit la science?
Le bicarbonate de sodium agit comme un tampon extracellulaire. Lors d’efforts intenses (pense: 30 s à ~8–12 minutes, ou efforts répétés), les muscles produisent des ions hydrogène (H+). Ça baisse le pH, on ressent la brûlure, la puissance chute. En augmentant la capacité tampon du sang, le bicarbonate facilite l’évacuation de ces H+ hors du muscle, retardant la fatigue liée à l’acidose. Plusieurs revues et méta-analyses concluent que l’ingestion aiguë de bicarbonate améliore la performance sur des efforts de haute intensité et sur des tâches répétées de type sprint/anaérobie. BioMed Central
Concrètement : les bénéfices sont les plus probants pour des efforts intenses et courts (quelques dizaines de secondes à quelques minutes), ou pour des efforts répétés (sprints intermédiaires, attaques, courts contre-la-montre). L’effet sur de longues épreuves d’endurance pure (1h+) est faible ou nul. BioMed Central

Doses et timing
La dose « classique » utilisée en labo est d’environ 0,2–0,5 g de bicarbonate/kg de poids ; la dose la plus fréquemment testée et recommandée pour un bon compromis efficacité/risque est ≈ 0,3 g/kg prise 60–150 minutes avant l’effort. Par exemple, pour 75 kg → ~22–25 g. Attention : cette dose a une forte probabilité d’entraîner des troubles gastro-intestinaux (ballonnements, nausées, diarrhée) si tu la prends en dose unique et sans adaptation. Lippincott Journals+1
Deux remarques pratiques :
- Teste toujours à l’entraînement (jamais une première fois en compétition). La tolérance est très individuelle.
- Si la dose unique te pose problème, essaye des alternatives.
Effets secondaires
Les effets gastro-intestinaux sont la limite numéro un : ballonnements, gaz, diarrhée, crampes. Chez certaines personnes, les doses élevées provoquent des symptômes sévères qui annulent l’avantage physiologique. Par ailleurs, c’est une source importante de sodium : si tu as de l’hypertension, des problèmes rénaux ou des restrictions par rapport au sel, parles-en d’abord avec ton médecin. PMC+1
Limiter les effets indésirables
Les chercheurs et les équipes ont développé plusieurs méthodes pour réduire la gêne GI (gastro-intestinaux) tout en conservant un effet ergogénique :
- Fractionner la dose : prendre la dose totale en petites prises (ex. 0,1 g/kg + 0,1 g/kg + 0,1 g/kg) sur plusieurs heures la veille et le matin. Ça peut aider la tolérance.
- Séries d’ingestion (serial loading) : prendre de petites quantités pendant 2–3 jours avant la course pour augmenter progressivement le bicarbonate sanguin.
- Formulations microencapsulées : des comprimés enrobés qui évitent que le bicarbonate ne réagisse dans l’estomac, diminuant les symptômes. Des études montrent une réduction des effets GI tout en gardant l’efficacité. PMC
- Hydrogel/gel : certaines marques (signalées chez des athlètes d’élite récemment) proposent des systèmes qui protègent le bicarbonate et le libèrent plus bas dans le tractus digestif, usage en compétition chez des athlètes de haut niveau et résultats prometteurs (mais coût élevé et recommandations d’utilisation prudente). The Wall Street Journal+1
Résumé : si la prise en simple dose te donne la tourista, explore la dose micro encapsulée, le fractionnement ou la série de petites doses ; mais teste d’abord à l’entraînement.
Pertinence
Le bicarbonate est le plus utile pour :
- efforts intenses de courte à moyenne durée (~30 s à 8–12 min),
- efforts répétés avec courtes récupérations (sprints en fin de course, efforts en peloton, séries d’intervalles rapprochées),
- événements où l’acidité musculaire limite la performance (ex. 800–2000 m en natation/rameur, 1–10 min efforts de tempo maximum répétés). BioMed Central+1
Pour un marathon, un Ironman ou une cyclosportive de 4+ heures, les bénéfices sont faibles voire inexistants car c’est la filière aérobie qui domine, pas l’acidose anaérobie.
L’éviter
- Personnes avec hypertension mal contrôlée ou restriction de sel (fort apport sodique).
- Athlètes ayant des antécédents digestifs importants (IBS sévère, reflux important) tant que la tolérance n’est pas testée.
- Ceux qui n’ont pas testé la stratégie à l’entraînement : l’essai en course, sans adaptation préalable, est une très mauvaise idée 💩PMC

Un protocole pratique
Voici un protocole de départ prudent à tester à l’entraînement, ajuster selon ton poids, ta tolérance et l’événement :
Option A: Protocole simple (si bonne tolérance)
- Dose : 0,3 g/kg de bicarbonate (ex. 22–25 g pour 75 kg) dissous dans 500–750 ml d’eau.
- Timing : prendre 90–120 min avant l’effort.
- Test : faire un entraînement avec la même séance que prévue en compétition pour valider tolérance.
Option B: Protocole fractionné (plus sûr si sensibilité GI)
- Dose totale : 0,3 g/kg répartie en 3 prises (0,1 g/kg) : la veille au soir, le matin et 2–3 h avant l’effort.
- Avantage : meilleure tolérance, montée progressive du bicarbonate plasmatique.
Option C: Formulation enteric-coated / hydrogel
- Suivre les recommandations du fabricant (souvent une seule prise 60–120 min avant) ; utile si les études montrent bonne tolérance pour ce produit. PMC+1
Important : consigne systématiquement poids avant/après séance, symptômes GI et perceptions. Ajuste.
Réservé aux élites ?
C’est un supplément ergogénique validé scientifiquement dans certains contextes. Il est autorisé et légal dans le sport (pas une substance dopante). Des athlètes d’élite l’ont utilisé en compétition (et récemment des produits commerciaux contenant bicarbonate ont été très visibles aux Jeux), mais son intérêt ne se limite pas aux pros : un amateur bien informé peut en tirer avantage sur des épreuves ciblées, à condition de tester et de respecter les précautions. The Wall Street Journal+1
Sources fiables
- Revue / position stand — International Society of Sports Nutrition : synthèse sur bicarbonate et performance. BioMed Central
- Revue générale / méta-analyses (efficacité et limites). BioMed Central
- Études et revues sur les effets gastro-intestinaux et la variabilité individuelle. PMC+1
- Recherches récentes sur formulations enteric-coated et nouvelles matrices (M-SB, hydrogel). PMC+1
- Articles de presse sur l’usage en compétition élite (contexte récent, adoption par certains athlètes). The Wall Street Journal
Mot du coach
Le bicarbonate de sodium est un outil : qui fonctionne dans le bon contexte, inefficace dans le mauvais, et parfois incontrôlable si tu le testes mal. Si tu veux l’essayer :
- définis clairement l’objectif (quel type d’effort tu veux aider),
- choisis une stratégie (dose/timing/formulation),
- teste à l’entraînement et note tout (GI, poids, sensations, perf),
- ne l’utilise pas en compétition sans validation,
- et si tu as un souci cardiaque ou rénal, consulte ton médecin avant.
